Et si la haute administration des Canadiens — peu importe le directeur général en place — avait fait du bon vieux principe selon lequel « on bâtit par le repêchage » sa règle d’or?
Et si cette même direction avait décidé d’appliquer à la lettre le bon vieux dicton voulant que « les meilleurs échanges sont souvent ceux qu’on ne fait pas »?
Et si les Canadiens, depuis l’arrivée en poste de son dépisteur Trevor Timmins, en 2003, n’avaient conclu absolument aucune échange, et n’avait procédé à aucune acquisition, de quoi aurait l’air la formation?
Est-ce que ce club du statu quo absolu serait supérieur ou inférieur à la formation actuelle?
J’explore ici un scénario fictif certes farfelu — j’en ai fait ma spécialité chez Balle Courbe, j’ai même un podcast consacré à ça — mais qui mérite quand même d’être étudié, si ce n’est que pour comparer la qualité du repêchage amateur à travers la ligue.
J’ai remonté dans les archives, en me servant de l’encan 2003 comme date butoir pour trois raisons : d’abord, il s’agit du premier repêchage de Timmins avec les Canadiens; ensuite, il s’agit d’une édition historique et particulièrement fructueuse, pour à peu près toutes les équipes; finalement, en reculant davantage, on retrouve surtout des retraités.
Avant de fouiller les archives, j’ai aussi établi quelques règles :
-Les joueurs repêchés, mais exilés ne sont pas admissibles (parce qu’il serait trop difficile de différencier les motifs de départ);
-Les joueurs inscrits dans l’alignement doivent avoir disputé au moins un match dans la LNH pour se qualifier;
-Les joueurs actuellement dans les rangs mineurs sont éligibles;
-Les joueurs repêchés avant 2003, mais toujours avec le même club aujourd’hui, peuvent être inclus (en d’autres mots, je me suis permis d’inclure Tomas Plekanec, Henrik Sedin, Daniel Sedin, Duncan Keith, Henrik Lundqvist et c’est pas mal ça).
Voici donc à quoi ressemble la version « organique, bio, 100 % locale » du CH…
Les attaquants
Avant même de me prêter à l’exercice, je savais de par l’assourdissante critique qui ternit la réputation de Timmins que j’allais me retrouver avec une attaque médiocre.
Max Pacioretty — Alex Galchenyuk — Brendan Gallagher
Charles Hudon — Tomas Plekanec — Artturi Lehkonen
Sven Andrighetto – Michael McCarron – Nikita Scherbak
Gabriel Dumont — Ryan White — Jacob De La Rose
Au premier coup d’œil, on constate au moins que la direction a été bonne dans la rétention du talent. Le seul joueur de cette liste qui n’est plus avec le CH, et qui pourrait encore aider le club, c’est Sven Andrighetto et ses 8 points en 11 matchs cette saison. Bref, les récoltes sont maigres, mais au moins on sait les garder.
Le constat d’échec est tout de même frappant au centre. Pourtant, dans cette même période, bien d’autres équipes ont réussi à dénicher pas moins de trois centres de qualité, sans nécessairement avoir accès à des choix aux premiers échelons : Boston (Krejci, Seguin, Bergeron), Washington (Backstrom, Perreault, Kuznetsov), New York (Stepan, Dubinsky, Anisimov), etc.
À l’autre bout du spectre, il y a Montréal, mais aussi Nashville, Dallas et Minnesota, qui ont été incapables de mettre le grappin sur un centre offensif digne de ce nom.
Les défenseurs
La feuille de route de Trevor Timmins n’est pas impeccable (on se rappelle les échecs Tinordi et Fischer), mais elle est tout de même reluisante à la défensive. C’est particulièrement impressionnant compte tenu que trois de ces défenseurs ont été sélectionnés après la première ronde.
Ryan McDonagh — PK Subban
Victor Mete — Mikhail Sergachev
Nathan Beaulieu — Alexei Emelin
Il est encore tôt pour confirmer l’éclosion de Sergachev et Mete, mais il semble qu’on a bel et bien affaire ici à deux défenseurs avec le potentiel de jouer sur la première paire. Inutile d’en ajouter sur McDonagh et Subban. Les arrières de soutien Nathan Beaulieu et Alexei Emelin ont tous deux un travail régulier dans la LNH en ce moment et les fans de Weber pourraient toujours se rabattre sur Yannick, un numéro 7 respectable.
Les gardiens
Il faut regarder au-delà de la sélection de Carey Price pour comprendre comment l’équipe de dépistage du Tricolore fait bien quand vient le moment de repêcher des gardiens – une position pourtant difficile à évaluer, surtout lorsqu’il est question de potentiel.
Bien sûr, on ne peut inclure Charlie Lindgren ou Michael McNiven, qui ont signé comme agent libre, mais on peut très bien nommer Zachary Fucale, Hayden Hawkey et Jaroslav Halak.
Quand on compare les cerbères repêchés par le Tricolore à ceux des clubs comme Dallas, dont le meilleur gardien choisi n’a disputé que deux matchs dans la ligue, on ne peut se plaindre; même constat d’échec au New Jersey, dont le dernier gardien maison est Scott Clemmensen.
Les conclusions
Même en liant fermement les cordons de la bourse et en refusant d’aller piger dans le marché des joueurs autonomes, les Canadiens auraient, avec ce scénario, mis sur la glace une formation aussi bonne que l’édition actuelle.
Il aurait été possible de délirer encore plus, et de tenter de prédire quel joueur aurait été sélectionné avec les choix conservés (par exemple, les choix de deuxième ronde envoyés à Chicago pour Andrew Shaw), mais je me suis gardé une petite gêne. Parce que même dans les deux pieds dans la science-fiction, il faut savoir mettre quelques barrières.
Je vous donne rendez-vous demain pour lire le résultat complet pour les autres clubs.
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